vendredi 27 février 2015

Vincent n'a pas d'écailles : le comique aquatique

Les américains vont se moquer de nous ; mais les français vont-ils avoir été conquis par ce pseudo héro d'aquarium ?

Plus proche du mutant que du super héro qui sauve le monde, Vincent, le protagoniste du film Vincent n'a pas d'écailles, nage comme un poisson dans l'eau.
C'est entre le surnaturel et le pur naturel que tente de se mouvoir le premier film du réalisateur Thomas Salvador. L'histoire, très épurée, est celle d'un homme qui devient plus fort au contact de l'eau : il "peut faire pareil, mais en mieux" raconte t-il à sa petite amie lorsqu'il lui avoue son secret. Parce que même si Vincent ne s'épanouit que dans les eaux calmes du lac à côté duquel il a déménagé au tout début du film, il ne veut absolument pas que les autres sachent ce dont il est capable. Il est alors seul à apprivoiser son corps et la nature et le rapport entre les deux ; ce jusqu'au milieu du film où débute une longue course poursuite avec une bande de policiers, qui semblent être moqués gentiment - tout du moins taquinés.
C'est une histoire à plusieurs phases. Il faut d'abord apprivoiser le personnage, raconté au présent et très peu dévoilé. Pas de dialogue ou de relation, voire même de narration, seulement une série de longs plans qui ne riment pas à grand chose à part à confronter la caméra à ce corps, qui n'est que trop peu exploité même dans les danses aquatiques - alors que l'on aurait pu imaginer de longs plans séquence fixes où ce corps s'élancerait dans l'eau, jouant avec l'espace et la dimension liquide. Puis dans un second temps, enfin, une rencontre. Le personnage se confronte à l'autre, et à partir de là le film et l'homme sont clairement portés par le personnage féminin - le dialogue (dé)monté qui révèle le secret est sans doute un dès meilleurs moments du film. Et enfin, un élément déclencheur, assez faible et très attendu, entraîne une très longue course poursuite qui mène à la fuite de l'autre côté du monde. Moïse a coupé la mer en deux et Vincent l'a traversé : une fin dans le même esprit que tout le film, un peu surréaliste et un peu dommage.
Effectivement, il est dommage de mettre autant de séquences de transition dans un film aussi court, mais quand il est porté par un scénario aussi mince, il est peut être difficile d'aller plus loin. Contrairement à son personnage, le film reste en surface. Vincent n'a pas d'écailles et n'a pas grand chose à raconter. Il est cet homme surnaturel ; pas un héros car il ne sauve personne, pas un méchant car il ne fait rien de mal, c'est juste Vincent, dans le monde le plus banal qui soit, complètement au naturel, qui essaient de vivre ensemble. Finalement proche de l'esthétique de Christophe Honoré dans son dernier film, la poésie qui porte Vincent n'a pas d'écailles n'est pas dans les corps, comme on aurait pu l'attendre, mais dans la nature ; et dans ce mystère qui rode, dont on ne cherche pas la réponse. La figure féminine exprime très bien cet émerveillement autour de son petit ami, pure et sensible, sans se soucier du pourquoi et du comment.
Le film évoluerait-il dans une autre dimension, une réalité proche la notre mais légèrement modifiée ? Il y a une part de rêve et une part de désillusion dans ce film qui se laisse porter par une idée "à la française", qui se veut faire du film d'auteur, qui reste finalement pâlot et nonchalant. 
Vincent n'a pas d'écailles, un film de Thomas Salvador
en salle depuis le 18 février 2014 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire